TUMULTES, 2012.
Atelier, Paris. |
TUMULTES n. m. pl. – Choses qui font battre le coeur.
Imaginez. Vous survolez la
Terre.
De temps en temps, attiré par une
couleur, vous vous posez sur un vaste continent ou sur une île minuscule.
Vous assistez à la naissance de
paysages d’avant le monde des Hommes, à des mouvements de planètes en
formation, magmas, forces telluriques. Les couleurs sont celles de la terre,
terre rouge, ocre jaune, terre noire et le si beau vert Véronèse.
Soyez attentifs, regardez les toiles
avidement.
Certains autour de vous parleront,
commenteront, philosopheront, sûrs de ce qui est beau et de ce qui ne l’est
pas. Ne vous laissez pas distraire, prenez une distance suffisante et ce
tumulte de mots formera une musique exquise comme celle de la pluie.
Ne dites rien, laissez votre corps
parler, une lueur joyeuse danser dans vos yeux, une tension se dénouer dans vos
épaules.
Vous serez prêts alors à vous
laisser émouvoir par les concrétions d’ocres minérales que déposent les
pigments, si intensément contrastées par les plages de noir dense.
Il vous faut éprouver l’émotion du
geste de Cécile d’une façon très concrète, palpable, charnelle : laissez-vous
gagner par son énergie et l’explosion des éclats de noirs.
Caressez du regard les œuvres,
encore et encore, voyez, ressentez avant tout la terre, des terres lointaines,
côtes découpées ou montagnes dressées. Alors apparaîtra l’eau qui dessine ces
paysages de rêves, puis le blanc de la toile en réserve, nuancé de nappes de
gris taupes, de gris bleus ou jaunes et enfin les mots gravés dans le corps de
la toile, des mots mystérieux, lisibles et illisibles.
C’est ainsi que ces toiles qui
génèrent une vibration si particulière vous feront ressentir la force née
de l’affrontement tumultueux de l’ombre et de la lumière.
Dans les premières années du XIe
siècle au Japon, Sei Shônagon, une dame d’honneur appartenant à la cour
impériale de Heian écrivit des «Notes de chevet», sous formes de listes. L’une
d’elles est intitulée :
Choses qui font battre le coeur
«Des moineaux qui nourrissent leurs
petits.
Passer devant un endroit où l’on
fait jouer des petits enfants.
Se coucher seule dans une chambre
délicieusement parfumée d’encens.
S’apercevoir que son miroir de Chine
est un peu terni.
Même quand personne ne vous voit, se
sentir heureuse au fond du coeur.»
Barbara
Sabaté Montoriol, Paris 2012.
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